Bonjour à tous, bienvenue à Paris pour ce beau meeting national de la CGT. Cela a été dit, nous sommes 6000 dans cette salle du Zénith. Il y avait beaucoup plus de volontaires tant était grande la volonté de se retrouver tous ensemble, toujours aussi déterminés et aussi combatifs.
Plusieurs milliers de camarades n’ont pas pu être avec nous ici. Ils nous regardent depuis de nombreux coins de France, par internet.
En votre nom, je les salue, qu’ils soient réunis dans des cinémas, des locaux syndicaux, dans les Bourses du Travail ou sur leur lieu de travail, bienvenus en direct de ce rendez-vous de lutte. Oui, nous sommes ici dans un rendez-vous de lutte pour réaffirmer nos revendications en matière de retraite.
Notre initiative ne relève bien sûr pas du hasard.
Dans un contexte marqué par une crise sévère du système capitaliste à partir de laquelle on tente de nous imposer toujours plus d’austérité, dans un calendrier de plus en plus occupé par les échéances politiques, la CGT, avec l’ensemble de ses organisations, prend la parole. Nous en avions pris l’engagement : l’adoption fin 2010 de la loi réformant les retraites ne mettrait pas fin à notre combat.
Aujourd’hui, nous poursuivons cette bataille et, soyons clairs, pour nous l’avenir c’est le rétablissement du droit au départ à la retraite à 60 ans pour tous et la reconnaissance des métiers pénibles. Pendant 8 mois en 2010, nous avons arpenté les rues, organisé des assemblées et des grèves, occupé des entreprises. Le fronton de certaines mairies était marqué de cette revendication qui à mobilisé des millions de salariés : « non au recul de l’âge de départ à la retraite »
Nous avons argumenté, fait la démonstration de l’injustice et du parti pris présidentiel pour la cause patronale.
Pendant 8 mois, notre campagne a fait bouger les lignes. Elle a été le ciment de l’unité indispensable pour s’opposer à cette loi rétrograde. Je redis ici combien les militants de la CGT doivent être fiers de cette bataille qui a eu une résonance internationale exceptionnelle.
Malgré cette mise en mouvement spectaculaire, malgré l’opposition de 70% de la population, le président de la République a fait le choix politique de passer en force et de s’appuyer sur sa majorité parlementaire pour imposer ce recul social.
Oh, ce n’est pas le seul grief de la CGT à l’égard de l’action de Nicolas Sarkozy, loin s’en faut. Je ne vous propose pas de faire ici la liste de toutes les mesures anti-sociales du gouvernement, il faudrait pour cela allonger beaucoup trop la durée de ce meeting et certains d’entre vous rentreraient trop tard à la maison.
La CGT s’exprimera prochainement sur le bilan peu glorieux de ce quinquennat.
Ceci dit, cette réforme là, elle pèse lourd dans le bilan.
Quand on fait le choix de bouleverser les règles sur un aspect aussi essentiel du contrat social comme les droits à la retraite et qu’on le fait dans de telles conditions, il ne faut pas être surpris des conséquences qui en résultent sur la popularité de l’exécutif.
Aussi, je crois pouvoir le dire, sans trop m’avancer, vous aurez du mal, Monsieur le futur candidat, à trouver dans cette salle et chez ceux qui nous écoutent, beaucoup de supporters pour vous aider à rempiler 5 ans de plus à l’Elysée.
Je voudrais dire aussi aux députés en place que nous saurons rafraîchir la mémoire des « salariés électeurs » au moment où certains d’entre vous vont également défendre leur fauteuil en juin prochain.
La CGT sait faire la distinction dans l’attitude des partis politiques. Il y a ceux qui font preuve de compréhension, voire de soutien à nos combats syndicaux, et ceux qui les ignorent ou sont responsables de nos colères. Nous avons apprécié comme il se doit la présence et le soutien en 2010 des partis de gauche aux manifestations et aux grèves s’opposant à la remise en cause de la retraite à 60 ans.
Comment pouvait-il en être autrement ? La retraite à 60 ans était une vieille revendication syndicale. Elle a été obtenue lorsque la gauche était au pouvoir.
Avec vous, je me félicite que les partis politiques que nous avons invités pour assister à ce rassemblement aient tous répondu présent, que plusieurs candidats à l’élection présidentielle, ou leur représentant, ainsi que des parlementaires soient également avec nous aujourd’hui.
Nous y voyons un signe d’espérance pour nos revendications. Vous le savez, l’aspiration au changement de président de la République s’accompagne d’une impatience au changement de politique sur le plan économique et social.
La CGT réunit en son sein des adhérents et des sympathisants de diverses sensibilités politiques. Nous revendiquons ce pluralisme dans la première confédération syndicale du pays ; c’est ce qui nous donne la force pour rassembler et être plus forts sur les revendications qui sont le ciment de notre unité dans le syndicat.
Nous le disons en toute amitié aux partis de gauche, à leurs élus, à leurs candidats, entendez cette aspiration à rétablir la justice sociale. Ecoutez la rancœur de ceux qui produisent les richesses de ce pays et qui ont été brocardés, et parfois humiliés ces dernières années. Ayez de la force de caractère et de l’ambition pour que les choses changent réellement dans les entreprises.
Pour ce qui nous concerne, nous allons poursuivre inlassablement notre campagne et nos mobilisations sur nos revendications. Ce meeting est une étape, il y en aura d’autres.
Nous savons aussi débusquer les déclarations opportunistes et la démagogie politique telles celles de Madame Le Pen. Cette dernière dit être aujourd’hui favorable à la retraite à 60 ans alors qu’avec son parti, en 2010, elle appelait le gouvernement à recourir à la force pour mettre un terme à l’attitude des« émeutiers » qui occupaient les rues. C’est là le vrai visage du Front national. En-dehors des périodes électorales, c’est toujours le camp du capital.
Nous sommes bien conscients qu’à propos de la retraite, comme sur bien d’autres sujets, c’est affaire de rapport de force dans un environnement hostile aux revendications.
Sous les coups de boutoir du patronat et au nom de la crise dont ils ne sont pourtant en rien responsables, les travailleurs, partout en Europe, devraient sans rechigner voir laminer leurs droits à la retraite et, plus largement, un ensemble de règles qui ont parfois été conquises de haute lutte.
Dans toute l’Europe, une vaste campagne de culpabilisation se développe aujourd’hui. Les salariés s’entendent dire qu’ils coûtent trop cher alors que l’analyse objective de cette crise démontre, ô combien, qu’elle trouve son origine dans un mode de développement qui privilégie le capital au détriment du travail.
En France, la productivité par heure de travail effectué est l’une des plus élevée au monde, supérieure de 10% à ce qu’elle est en Allemagne. Nous ne sommes ni des fainéants ni des incapables ! Dans son show largement télévisé de dimanche soir, le président de la République a repris cette vieille rengaine du coût du travail pour justifier deux mesures de portée considérable et je veux m’y arrêter un instant. La première d’entre elles que nous avons déjà qualifié d’arnaque consiste à transférer une part des cotisations sociales prélevée dans les entreprises à hauteur de 13 milliards d’euros sur le consommateur par une hausse de la TVA de 1,6 %.
Voilà donc un cadeau supplémentaire aux entreprises qui vient s’ajouter aux 170 milliards d’euros d’argent public et d’exonérations dont bénéficient les employeurs déjà au nom de l’emploi.
Madame Parisot vient d’applaudir bruyamment cette décision qu’elle n’avait pas espéré obtenir à 3 mois des élections présidentielles.
Dans un numéro de prestidigitateur, le président dit être sûr que la hausse de la TVA n’aura aucune conséquence sur les prix. Il n’est pas besoin d’être un économiste chevronné pour prédire au contraire que, loin d’assister à un comportement vertueux des entreprises, la hausse de la TVA provoquera une hausse des prix et donc une baisse du pouvoir d’achat.
On nous dit aussi : il n’y aura pas de hausse d’impôt. Mais qu’est-ce que la TVA si ce n’est justement l’impôt le plus inégalitaire qui soit ? S’il y a bien une réforme fiscale à imaginer en profondeur dans notre pays, elle doit notamment viser à rétablir une plus grande justice fiscale qui tienne compte des revenus réels des uns et des autres.
Nicolas Sarkozy, qui a instauré le bouclier fiscal pour protéger les plus riches veut nous faire prendre des vessies pour des lanternes.
La comparaison avec l’Allemagne vient comme un leitmotiv pour la démonstration présidentielle. Ça ne tient pas la route et nous en avons fait la démonstration lors du fameux sommet du 18 janvier.
Ce que l’on appelle le coût du travail est aujourd’hui très comparable en France et en Allemagne. Nous le constations la semaine dernière avec nos amis du DGB, la Confédération syndicale allemande.
Que disent-ils ? Ils disent, et leurs analyses nous intéressent, que leur gouvernement s’est efforcé ces dernières années de faire baisser les salaires en Allemagne, d’augmenter considérablement la flexibilité des horaires et la précarité des emplois, au point qu’aujourd’hui le DGB revendique l’instauration du salaire minimum qui n’existe pas dans le pays, plongeant des centaines de milliers de salariés dans la précarité la plus totale. En 10 ans, 8 salariés allemands sur 10 ont perdu du salaire. 22% des allemands qui travaillent n’ont pas les moyens de vivre décemment. L’Allemagne n’est pas l’Eldorado qui nous est décrit.
S’il est vrai que l’industrie allemande affiche d’autres résultats que chez nous, la responsabilité n’incombe pas aux travailleurs en France.
Les entreprises allemandes consacrent beaucoup plus de moyens à la recherche et à la formation professionnelle.
Les entreprises françaises, elles, se consacrent d’abord à leurs actionnaires. En 2010, les entreprises françaises non financières auront distribué 210 milliards d’euros à ces derniers pour seulement 180 milliards consacrés au développement de l’appareil productif.
Les véritables défenseurs de l’industrie depuis des mois sont ceux qui se battent dans les entreprises et sont parfois contraints d’occuper les usines pour mettre en évidence les gâchis et les erreurs de gestion qui débouchent sur un saccage de notre potentiel industriel.
Le vieux discours patronal selon lequel les « baisses de charges » d’aujourd’hui font les emplois de demain est usé jusqu’à la corde.
Ensemble, nous devons dénoncer cette manipulation et nous opposer à cette perspective d’augmentation de la TVA. ! Nous devons aussi réaffirmer que les cotisations qui servent à financer la protection sociale ne sont ni la propriété de l’employeur, ni celle du gouvernement.
Les cotisations sont une part du salaire.
Elles appartiennent aux salariés. C’est à eux qu’il revient de décider à quoi ils les affectent.
La seconde mesure annoncée dimanche vise à instaurer des accords au niveau de chaque entreprise dits « de compétitivité ». Je n’hésite pas à considérer cette offensive comme sans précédent à l’égard du code du travail et je m’en explique :
Le gouvernement donne deux mois pour que patronat et syndicats trouvent un accord pour fixer un cadre national aux négociations futures dans les entreprises (on se demande pourquoi il ne nous donne pas 4 mois de délais !) tout en ajoutant :"s’il n’y a pas d’accord je ferai une loi quand même !"
En même temps, il précise ce que doivent contenir ces futurs accords d’entreprise : ils doivent permettre à l’employeur « une capacité d’adaptation face aux chocs conjoncturels d’activité » ; je n’invente rien, c’est précisé dans la lettre que nous avons reçu du Premier Ministre hier soir.
Et nous arrivons au bois dur : ces accords d’entreprise devront permettre les ajustements temporaires liés à l’activité concernant la durée du travail, l’organisation du travail, la rémunération.
Cerise sur le gâteau : ces accords s’imposeront sur les normes conventionnelles et sur le contrat de travail.
Autrement dit, il s’agit de permettre aux employeurs en fonction de la conjoncture d’exercer légalement leur chantage en exigeant des baisses de salaire, une variation du temps de travail. S’ils obtiennent un accord d’entreprise, plus aucun salarié ne pourra exiger le respect de son contrat de travail.
Et vous savez comme moi dans qu’elles conditions les employeurs peuvent arracher des accords d’entreprise avec ce qu’il faut bien appeler parfois des signatures syndicales de complaisances.
Nous avons déjà des expériences d’accords d’entreprise au nom de la sauvegarde de l’emploi : Continental, la Fonderie du Poitou et bien d’autres. Les salaires ont baissé, les horaires diminué ou augmenté suivant les cas et l’entreprise a fermé quand même. La nouveauté, c’est qu’un salarié pouvait exiger le respect de son contrat de travail. Demain, terminé ! Chacun sera démuni et n’aura plus aucun recours ni sur ses horaires ni sur son salaire. La durée légale du temps de travail deviendrait virtuelle.
Dans ce cadre là, les dispositifs de chômage partiel disparaissent. Les entreprises et l’Etat font au passage des économies. C’est le salarié qui devient la variable d’ajustement.
C’est une révolution du droit du travail mais cette révolution là, chers camarades, il faut la combattre !
Dans le cas d’espèce, ce n’est pas l’Allemagne qui sert de modèle mais les pays anglo–saxons là ou il n’y a que 15 à 20% de travailleurs couverts par des accords collectifs comme aux Etats-Unis, en Australie ou 35% en Grande-Bretagne.
Le patronat en rêvait, le gouvernement veut le faire, mais la partie ne fait que commencer.
En tout cas, une chose est sûre, il ne faudra pas compter sur la CGT pour collaborer à cette opération de sabotage du droit social. La CGT compte sur chacun d’entre vous pour informer rapidement sur ce qui est en jeu.
Age de départ à la retraite, conventions collectives, procédures de licenciement, salaire minimum, droit de grève, voire de manifestation, et j’en oublie, tout devrait passer à la moulinette de la compétitivité, pour une mise en concurrence plus féroce entre salariés, avec comme conséquence de tirer tout le monde vers le bas.
L’heure est grave, mes chers Camarades.
Non contents de multiplier les plans de rigueur et les réformes régressives dans chaque pays, sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy et d’Angela Merkel, les chefs d’états et de gouvernements ont décidé de passer à un cran supérieur pour imposer l’austérité généralisée en Europe. Ils s’apprêtent à signer un nouveau traité début mars.
Une réunion exceptionnelle des syndicats européens vient de décider de tirer la sonnette d’alarme et d’organiser la riposte. Il faut dénoncer le caractère antidémocratique de la procédure à la hussarde qui cherche à mettre les citoyens devant le fait accompli.
Il faut s’opposer à la « règle d’or » dans la constitution de chaque pays. Elle consisterait à imposer la rigueur budgétaire et sociale pour les salariés dans tous les états de l’Union européenne de façon autoritaire et arbitraire.
Face au défi qui nous est lancé, nous avons décidé qu’il était temps que les mobilisations dans chaque pays trouvent un élan supplémentaire par une action syndicale coordonnée des travailleurs de toute l’Europe. (Je salue au passage l’imposante grève de nos amis belges hier).
Aussi, je vous informe et je vous appelle à préparer une puissante mobilisation de toutes les professions le 29 février prochain pour dire NON à l’austérité en France, NON à l’austérité en Europe.
Trop, c’est trop ! Nous ne voulons pas de ce nouveau traité pour notre avenir et pour l’avenir de l’Europe.
Nous ne voulons pas de l’augmentation de la TVA, nous ne voulons pas des accords de compétitivité à la sauce Sarkozy !
La CGT créera bien sur les conditions pour que la mobilisation en France soit la plus unitaire possible le 29 février.
Quand on parle de retraite, on doit parler aussi d’emploi, de conditions de travail et du travail lui-même, de salaires ; on doit parler de la répartition de la richesse créée, de la place faite aux travailleurs dans une société. Quand on parle retraite, on parle de solidarité entre les générations et de l’avenir de notre jeunesse.
Quand on parle de retraite, on parle d’un choix de société.
La possibilité de bénéficier d’une vraie retraite a été une transformation fondamentale de la vie humaine. Il a fallu près d’un siècle de batailles sociales en France pour imposer ce droit.
Finie cette « retraite pour les morts et pour les riches » que dénonçait la CGT dans les années 20.
Finis ces « vieux jours » qui s’identifiaient à une période de pauvreté.
Finie, ou presque, la crainte de beaucoup de dépendre, à la fin de leur vie, de la solidarité familiale ou du bureau d’aide sociale. Ce progrès de civilisation ne concerne encore que 10% des travailleurs à l’échelle du monde. Mais il va dans le sens du développement, dans le sens du progrès.
Est-ce cela qui s’avère insupportable pour les marchés financiers et leur bras armé, les agences de notation ?
Toutes les réformes que nous avons eu à combattre ont cherché à accréditer l’idée que les retraites, donc les retraités, étaient d’abord un fardeau pour la société dont il fallait réduire le coût.
En 1987, le gouvernement change le mode d’indexation pour le calcul de la retraite qui ne se référera plus à l’évolution du salaire moyen mais aux prix,
En 93, c’est le passage des 10 aux 25 meilleures années de référence et l’allongement de la durée requise pour une retraite sans décote qui passe de 150 à 160 trimestres,
En 95, c’est la tentative de remise en cause des régimes spéciaux avortée par la mobilisation syndicale .Je ne développe pas, je risquerais d’être trop bavard.
En 2003, nouvelles règles pour la fonction publique et l’instauration d’un mécanisme qui allonge sans fin la période d’activité exigée au fur et à mesure que l’espérance de vie augmente. C’est aussi la révision à la baisse des droits associés à la maternité et à l’éducation des enfants,
En 2007, nouvelle offensive sur les régimes spéciaux. Le rapport de force contraint cependant le gouvernement à négocier,
En 2010, nouvel allongement de la durée de cotisation et report des âges de départ en retraite à 62 et 67 ans,
En 2011, c’est l’accord patronat - syndicats sur la retraite complémentaire, que la CGT refuse de signer puisqu’il valide le recul de l’âge de la retraite.
A ce propos, c’est pour nous toujours surprenant de voir qu’un syndicat peut appeler à la grève générale le lundi et signer le vendredi un texte qu’il dit combattre farouchement.
Le bilan de toutes ces réformes est calamiteux. A salaire d’activité équivalent, les pensions ont baissé. La pauvreté chez les retraités, qui avait considérablement diminué jusqu’aux années 90, a commencé à remonter.
Le gouvernement connaissait les conséquences prévisibles, la preuve : il a introduit la possibilité de cumuler emploi et retraite.
Loin de sauvegarder notre système de retraite, ces réformes l’ont fragilisé au point d’ouvrir de nouveaux appétits aux banques et aux assurances.
La retraite, c’est une nouvelle phase de la vie où de nouveaux projets peuvent se construire. La place des retraités est d’un apport considérable pour la société, et ce dans de multiples domaines. Dans le monde associatif, culturel et sportif, dans la vie politique, dans l’activité syndicale et dans bien d’autres domaines leurs contributions sont importantes. Les retraités occupent aussi, comme chacun le sait, une place importante au sein des familles. En fait, ils apportent leur quote-part à la vie de la cité. Sans les retraités, la vie serait beaucoup plus difficile pour tout le monde.
C’est cette réalité que veulent ignorer tous ceux qui n’envisagent la retraite que comme un coût, tout comme le travail d’ailleurs. Il n’y a aucune raison de considérer que toute augmentation de la durée de la vie doit entraîner mécaniquement une augmentation de la durée d’activité. Lorsque Nicolas Sarkozy nous répète : « entre le choix de faire travailler plus longtemps et celui de diminuer les retraites, j’ai choisi la première solution ». C’est faux !
Il a imposé une durée du travail plus longue pour avoir sa retraite ET a réduit le niveau de la retraite par rapport au salaire d’activité.
Le mot d’ordre devient « travailler plus longtemps pour gagner moins » et son problème, c’est que beaucoup de salariés l’ont bien compris.
La question aujourd’hui n’est pas de savoir comment on va rendre acceptable un recul social programmé. Il faut remettre à plat l’ensemble du dossier, explorer les pistes qui ont été arbitrairement fermées par le patronat et les gouvernements et ouvrir les négociations qui n’ont jamais eu lieu.
La CGT n’entend pas fuir les problèmes, elle a une analyse, des revendications et une conception qui doivent être pris en compte. Nous avons au moins 3 défis à relever :
1.Le défi de la démographie,
2.Le défi de l’égalité,
3.Le défi de la crise.
1) la démographie
C’est le défi derrière lequel se cachent tous ceux qui veulent imposer des mesures régressives. Il est possible que le nombre de retraités augmente de 50% dans le prochain quart de siècle. Le nombre de retraités a déjà doublé en 25 ans. Si nous prenons en compte ces données, nous récusons le catastrophisme véhiculé régulièrement à la suite de la publication de chaque rapport du Conseil d’Orientation des Retraites. la France, par son taux de natalité élevé assure le renouvellement de sa population. La France n’est pas dans la pire des situations en Europe.
Sur le fond, chacun sait que sur le très long terme, ce qui va être déterminant pour faire face aux besoins de financement sera le nombre de personnes réellement au travail, leur niveau de qualification, le volume des investissements et l’importance du progrès technique.
A quoi ça sert de reculer l’âge de départ à la retraite quand un salarié sur deux n’est plus en activité quand il liquide sa pension, parce que très souvent il a été licencié avant l’heure ?
A quoi ça sert de reculer l’âge de départ à la retraite pour les salariés que les entreprises veulent bien garder pendant que nos enfants se voient fermer la porte des bureaux d’embauche ?
La loi de 2010, c’est 1 million d’emplois fermés aux jeunes. Cela fait plusieurs années que nous travaillons main dans la main avec plusieurs organisations de jeunes comme l’UNEF, l’UNL et la JOC. Je salue leurs représentants et les assure de notre volonté de poursuivre ce combat en commun.
A quoi ça sert d’user davantage les salariés au travail quand 4 à 5 millions de personnes en âge de travailler sont refoulées et marginalisées ?
Le véritable cancer ce ne sont pas les bénéficiaires d’allocations sociales, ce ne sont pas les retraités trop nombreux, c’est le chômage et la précarité des emplois au nom du profit.
Le véritable fléau, c’est de ne faire travailler que ceux qui ont entre 30 et 50 ans en exigeant d’eux toujours plus de productivité, toujours plus de flexibilité. Les exigences de rentabilité qui pèsent sur le travail conduisent à une dégradation des conditions de travail. C’est le travail lui-même qui est aujourd’hui malade. Pour l’embauche avant 30 ans : ce n’est pas l’heure ! Pour l’embauche après 50 ans : ce n’est plus l’heure. Chers camarades, il va falloir qu’on leur remette les pendules à l’heure !
2) Il y a le défi de l’égalité
Nous y sommes tous particulièrement sensibles. A travail équivalent, deux salariés doivent avoir la même retraite, qu’ils soient du public ou du privé, qu’ils soient femme ou homme, qu’ils aient accompli leur carrière dans un grand groupe ou dans une PME. Contrairement à ce qui est martelé, même avec des modes de calcul différents, l’écart des retraites entre salariés du public et salariés du privé, à structure de qualification égale, est aujourd’hui minime, qu’on le mesure dans l’absolu ou au travers du taux de remplacement du salaire par la retraite.
Par contre, on ne parle pas de la différence entre la pension moyenne des hommes et celle des femmes qui continue à être considérable : la retraite des femmes représente en moyenne moins de 65% de celle des hommes !
C’est un scandale auquel nous devons nous attaquer ensemble en exigeant maintenant des sanctions réelles à l’égard des entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale entre les femmes et les hommes !
Je rappelle que l’égalité salariale entre les femmes et les hommes apporterait à la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse 4 milliards en 2014 et 20 milliards en 2020 tout en ouvrant des droits supplémentaires pour les femmes.
On ne parle pas non plus assez de l’inégalité fondamentale que représente l’inégalité d’espérance de vie due aux conditions de travail. Comment peut-on admettre aujourd’hui que des ouvriers puissent voir leur perspective de retraite en bonne santé raccourcie en moyenne de 6, 7 ou 8 ans par rapport à des catégories plus favorisées ?
Avec la loi de 2010, le gouvernement a prétendu répondre à la question de la pénibilité. Comme chacun le sait, il n’en a rien été. Ce que le gouvernement a mis en place, c’est un dispositif bis d’invalidité. Ce dispositif devait concerner, selon le gouvernement, de l’ordre de 15 à 20 000 salariés par an lorsqu’il aurait atteint son régime de croisière. Eh bien nous en sommes loin ! Selon les chiffres de la CNAV, seulement 997 pensions au titre de la pénibilité ont été attribuées entre le 1er juillet et le 31 décembre 2011 !
Pour notre part, nous évaluons entre 100 et 150 000 par an le nombre de salariés qui devraient bénéficier d’un véritable dispositif pénibilité. Cette évaluation n’est pas faite au doigt mouillé. Nous avons travaillé avec les organisations de la CGT, des experts de différentes disciplines. Et je remercie certains aujourd’hui présents parmi nous, de leur précieuse collaboration.
Ces travaux ont permis la définition de critères nous mettant en capacité de mieux identifier la pénibilité, condition indispensable à sa juste reconnaissance. Nous sommes en capacité aujourd’hui, comme en témoigne l’existence de notre projet d’accord, de promouvoir un dispositif qui permette aux salariés usés prématurément de bénéficier d’un départ en retraite anticipé.
Nous le redisons clairement à ce meeting : avec la restauration du droit au départ en retraite à 60 ans, nous visons le droit au départ anticipé pour les métiers pénibles !
Comment, lorsqu’on parle des inégalités, ne pas s’intéresser aux écarts de traitements entre le haut et le bas de l’échelle ?
Les patrons du CAC 40, ceux qui nous expliquent que l’on coûte trop cher, ont vu leurs rémunérations augmenter de 34% ces 5 dernières années. Sans doute le prix de la reconnaissance des dividendes garantis à leurs actionnaires.
La quasi-totalité des entreprises françaises du CAC 40, 35 sur 40, distribuent ce qu’on appelle des « retraites chapeaux « à 800 cadres dirigeants d’entreprises qui bénéficient, en France, de ce régime d’exception. Ce sont de généreuses pensions dites« sur complémentaires » dont chacune se monte à plusieurs centaines de milliers d’euros par an. Il faut supprimer ce dispositif qui relève du vrai privilège. !
3) Le troisième défi est celui que pose la crise.
La vraie nouveauté du Rapport de 2010 du Conseil d’orientation des retraites était le chiffrage des conséquences de la crise sur l’équilibre à court et moyen terme du système de retraite du fait de l’effondrement de l’emploi.
Le manque à gagner est brutal, de grande ampleur et se prolonge sur plus d’une décennie. Pour certains, cette « croissance perdue » ne se rattrape jamais, ce qui condamne la France comme une partie des pays européens à jouer désormais en seconde division de l’économie mondiale. Nous pensons au contraire qu’une politique économique adaptée peut nous épargner cette longue phase de purgatoire.
Encore faut-il s’appuyer sur les femmes et les hommes qui produisent, sur les capacités humaines, sur leur créativité et sur la solidarité. On doit donc exclure de faire payer aux salariés une troisième fois le coût de cette crise. Victimes des suppressions d’emplois massives, victimes de pertes importantes de pouvoir d’achat, il faudrait que les salariés payent en plus la facture sur leurs droits à la retraite ! Ce serait intolérable.
Cette détérioration flagrante de la situation des retraites alimente le doute sur la pérennité de notre système, notamment chez les jeunes, et sert de point d’appui aux campagnes de promotion des systèmes par capitalisation au nom de la liberté individuelle.
Le développement des systèmes d’épargne individuelle est d’emblée dangereux. La CGT récuse l’idée de fonds de pension.
La retraite doit demeurer une notion collective propre à la répartition, différente de la logique patrimoniale. La situation présente d’une majorité de fonds de pension de par le monde devrait dissuader d’aller plus loin. Aux Etats-Unis, le déficit estimé de ces régimes de capitalisation atteint 1000 milliards de dollars. Rien qu’aux Pays-Bas, c’est près de la moitié des fonds de capitalisation qui sont virtuellement en cessation de paiement ; près d’un sur trois va baisser brutalement le niveau des rentes servies.
La CGT refuse la piste d’un « troisième étage » des régimes de retraite en capitalisation qui « cannibaliserait » forcément la répartition. Les employeurs consacrent ainsi, bon an mal an, plusieurs milliards d’euros sous forme d’abondements des plans de retraite d’entreprises et des PERCO alors qu’ils refusent toute augmentation des cotisations.
La CGT ne s’inscrit pas davantage dans la perspective d’un abandon du régime de retraite actuel au bénéfice de mécanismes par points ou par « comptes notionnels ». Faire dépendre davantage le montant de sa future retraite de sa seule capacité d’épargne ou de choix purement individuels briserait les solidarités et augmenterait l es inégalités.
Encore une fois, ce sont ceux du bas de l’échelle qui seraient les principaux perdants.
Quels sont les objectifs pour lesquels se bat la CGT ?
Le retour du droit à la retraite à 60 ans pour tous. Comme son nom l’indique, l’utilisation de ce droit au départ est laissée à l’appréciation du salarié qui, s’il le souhaite, peut poursuivre son activité,
L’instauration d’un droit au départ anticipé pour les métiers pénibles par des bonifications de carrière liées à l’intensité et aux années d’exposition aux facteurs de pénibilité,
La redéfinition de ce qu’est une « carrière complète » pour acquérir l’ensemble de ses droits en intégrant des périodes liées aux études et à l’inactivité forcée,
Un niveau de pension au minimum de 75% du salaire d’activité avec un plancher égal au SMIC. Je rappelle que la CGT revendique le SMIC à 1700 euros,
Une période de référence pour le calcul des droits à la retraite qui prenne en compte les meilleures années de salaires,
Une indexation des pensions liquidées sur l’évolution des salaires des actifs.
S’agissant des besoins de financement je voudrais rappeler quelques pistes qui ne sont pas exhaustives :
la sortie de la politique d’exonération de cotisations patronales qui coûte aujourd’hui plus de 30 milliards par an aux finances publiques. C’est au bas mot 10 milliards d’euros qui pourraient revenir aux régimes de retraites. Pour cela, une réforme du mode de contribution sociale des entreprises est indispensable ;
L’abandon d’une pure logique d’assurance qui permet aux employeurs les moins vertueux de reporter sur les autres les coûts liés à leur comportement. Plus l’entreprise réduit ses effectifs et ses salaires, plus elle réduit ses contributions aux régimes sociaux. Nous proposons de transformer la contribution patronale aux institutions sociales sur la base d’une modulation des cotisations permettant notamment de tenir compte de leur gestion de l’emploi et du travail ;
l’extension de l’assiette des cotisations pour la retraite à tous les éléments de rémunération, primes, intéressement, participation. 120 milliards d’euros de rémunérations para-salariales échappent aujourd’hui totalement ou partiellement aux cotisations sociales d’après la Cour des Comptes. Elle procurerait dans l’immédiat 9 à 10 milliards de ressources supplémentaires ;
la mise à contribution des revenus financiers des entreprises au moins à hauteur de la cotisation des salariés. Seuls les revenus tirés des placements financiers des personnes physiques sont imposés. Il s’agirait d’instaurer un prélèvement spécifique pour les personnes morales qui perçoivent bon an mal an 250 milliards de revenus financiers. Un prélèvement voisin du niveau de la cotisation patronale retraite rapporterait chaque année 20 milliards d’euros.
Ces mesures, associées à une véritable politique pour le plein emploi, permettraient de financer à l’horizon 2050 les 4 à 6 points de richesses indispensables.
Garantir notre système et améliorer la retraite est donc tout à fait crédible.
Chers Camarades, Chers Amis,
Contrairement à ce que l’on veut leur faire croire, les salariés ne sont pas condamnés à subir les effets des décisions prises sans eux, voire contre eux. Organisés et unis, ils peuvent avoir prise sur les événements. A cet égard, nous ne sous-estimons pas les changements susceptibles d’intervenir à l’occasion des échéances politiques.
La longue expérience de la CGT nous enseigne aussi qu’en toutes circonstances, l’activité et l’action syndicale sont indispensables pour la défense des intérêts des salariés d’aujourd’hui et pour ceux de demain. Cette intervention appelle partout un renforcement des forces syndiquées à la CGT, une présence plus large dans les entreprises, dans les localités. Adhérer à la CGT, c’est augmenter les chances d’un retour de la retraite à 60 ans.
Adhérer à la CGT, c’est affirmer sa dignité en tant que salarié et être acteur dans les choix de sociétés. Ensemble, nous allons continuer le combat. Ensemble, nous allons faire en sorte de ne pas laisser les affaires du monde aux seules mains du monde des affaires. Merci à tous pour votre précieux engagement. Rendez-vous le 29 février.
Vive la retraite à 60 ans !